Greenpeace alerte sur des privations de liberté démesurées à l’encontre d’activistes dénonçant l’élevage industriel

Agriculture

Lundi 20 novembre, des activistes de Greenpeace France ont déversé deux tonnes de lisier devant le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire pour exiger un moratoire sur la construction et l’agrandissement des fermes-usines, dans le cadre de la future loi d’orientation agricole (PLOAA) [1]. A cette occasion, 11 personnes ont été placées en garde à vue à 9h30 au commissariat du 13ème arrondissement de Paris : certains activistes ont été privés de leur liberté pendant plus de 55 heures.

Voir les images de l’action ici.

Six activistes ont été libérés avec une convocation aux fins de notification d’un avertissement pénal probatoire (nouveau rappel à la loi) après 33 heures de garde à vue : une durée complètement disproportionnée pour cette mesure qui toutefois constate la commission des infractions d’entrave et de dégradation sans possibilité de recours.

Cinq autres personnes ont été déférées : elles ont passé une nuit de plus en détention, au dépôt du tribunal puis quatre d’entre elles se sont vues notifier de manière irrégulière car incomplète des ordonnances pénales. Un autre activiste a fait l’objet d’un classement sans suite sous condition d’une contribution citoyenne. C’est le traitement infligé par le procureur de la République et la Préfecture de police aux activistes non-violents ayant dénoncé la responsabilité du ministre de l’Agriculture face à l’industrialisation de l’élevage, dans un contexte de crises climatique et environnementale.

Ces privations de liberté disproportionnées interviennent alors que des activistes ont déjà subi des gardes à vue prolongées de manière excessive au début du mois, suite à une mobilisation devant le Ministère de la Transition écologique [2].

Nous assistons à nouveau à une mascarade judiciaire avec des détentions arbitraires contre des militants qui se retrouvent au final avec des mesures alternatives aux poursuites. De simples auditions auraient pu suffire. Toutes les voies de recours seront enclenchées face à ces atteintes aux libertés fondamentales pour dénoncer ces graves dysfonctionnements de la justice”, condamne Laura Monnier, responsable juridique à Greenpeace France.

Ces décisions judiciaires interviennent alors qu’hier, mardi 21 novembre, 150 agriculteurs ont déversé, devant la préfecture de la Drôme, du fumier et des pneus usés, mécontents de leurs échanges avec le préfet [3]. Aucun d’entre eux n’a été interpellé. De même, une manifestation de la Coordination Rurale en octobre dernier n’a fait l’objet d’aucune répression envers les agriculteurs : ils ont même été reçus par la direction départementale du territoire, devant laquelle ils ont déversé, entre autres, fumier et déchets [4].

Force est de constater la considérable différence de traitement entre les actions de militants écologistes et celles des syndicats prônant une agriculture industrielle, telle que la FNSEA [5], alerte Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne Agriculture à Greenpeace. Nous sommes et nous resterons déterminés pour alerter sur les impacts délétères de l’agriculture et de l’élevage industriel. Nous continuerons à faire pression sur le ministère de l’Agriculture pour obtenir une transition agro-écologique à la hauteur des enjeux : cela doit nécessairement passer par la mise en place d’un moratoire sur les nouvelles constructions et les agrandissements de fermes-usines en France.

Cette différence de traitement, qui privilégie le dialogue avec les tenants de l’agriculture industrielle, est révélatrice des priorités de l’Etat et du ministère de l’Agriculture en matière de politique agricole.

Dans un contexte d’urgence climatique et d’effondrement de la biodiversité, Greenpeace s’inquiète de l’augmentation et du durcissement de la répression, dans l’objectif de museler la contestation et les mouvements de désobéissance civile.

 

Notes aux rédactions : 

[1] Voir le communiqué de presse de Greenpeace France : “[Action] Greenpeace déverse deux tonnes de lisier devant le ministère de l’Agriculture pour exiger un moratoire sur les fermes-usines” (20/11/2023) 

[2] Voir communiqué de presse de Greenpeace France : “Calvaire judiciaire pour les militants de Greenpeace dénonçant l’inaction climatique” (8/11/2023)

[3] Voir article du Dauphiné : “En colère, des agriculteurs déversent du fumier et des légumes pourris” (21/11/2023) et le compte Instagram de la préfecture de la Drôme

[4] Voir article de France Bleu Limousin : “Limoges : mobilisation de la Coordination rurale contre les conditions d’attribution de la PAC” (19/10/2023)

[5] Voir article de Reporterre “L’étonnant laxisme de l’État face à la colère des agro-industriels” (20/04/2023) et de Basta ! “60 ans d’actions violentes : faut-il pour autant dissoudre la FNSEA ?” (28/06/2023)