La Politique agricole commune (PAC) est l’ensemble des aides financières vers

La Politique agricole commune n’a pas la main verte

Agriculture

La Politique agricole commune (PAC) est l’ensemble des aides financières versées aux agriculteurs et agricultrices de l’Union européenne. Elle représente environ 40% du budget de l’UE et façonne l’agriculture dans le Vieux Continent depuis les années 1960. Aujourd’hui, le constat est sans appel : la PAC a favorisé le développement d’une agriculture industrielle et polluante au détriment des petits producteurs et des fermes plus respectueuses de l’environnement. Pour la prochaine réforme en 2021, il faut inverser cette tendance et se mobiliser dès maintenant pour une PAC plus verte, plus juste et plus durable.

 

Notre système de production alimentaire contribue fortement aux changements climatiques

L’impact environnemental de l’agriculture en quelques chiffres

Au niveau mondial, l’agriculture représente 24% des émissions de gaz à effet de serre. D’après le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), les émissions de méthane et de protoxyde d’azote liées aux activités agricoles pourraient tripler d’ici à 2055. Le secteur agricole ne pollue pas seulement l’atmosphère, mais aussi les eaux. En Europe, 90% des bassins versants (c’est-à-dire les territoires qui alimentent les cours d’eau en eau), 50% des eaux de surface et 33% des réservoirs d’eau souterraine sont pollués par nos activités agricoles.

Et l’élevage, dans tout cela ?

D’après une étude sur l’impact environnemental de notre système alimentaire, 81% des émissions de gaz à effet de serre relatives à l’agriculture en Europe sont liées à l’élevage et à la production d’aliments pour les animaux. Si l’on considère l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre en Europe, entre 12 et 17% sont dues à l’élevage. C’est l’élevage industriel, qui s’est fortement développé grâce aux aides de la Politique agricole commune, qui est responsable de cette forte pollution de notre environnement. Or, les alternatives existent : l’élevage biologique et écologique à taille humaine peut répondre aux enjeux sociaux et environnementaux de l’agriculture européenne.

 

La PAC a encouragé l’industrialisation de notre agriculture

Un système inégalitaire

Environ trois millions de fermes ont disparu entre les débuts de la PAC et aujourd’hui. En 1955, on comptait plus de six millions de paysans européens ; en 2010, ils n’étaient plus qu’un million. Beaucoup de fermes ont disparu pour laisser place à de grosses exploitations agricoles car la PAC distribue ses aides en grande partie selon le nombre d’hectares que possède un agriculteur. Elle incite donc les agriculteurs à agrandir leurs exploitations.

L'usage de pesticides en Espagne

Un tracteur répand des pesticides dans une exploitation en Espagne.  
© Greenpeace / Ángel Garcia

Les petits producteurs sont défavorisés, et certaines activités comme le maraîchage, qui utilise de petites surfaces, sont touchées par cette inégalité. Les aides sont très mal réparties aujourd’hui : 1,5% des bénéficiaires touchent 32% du montant total des aides PAC. Selon une étude menée en 2017, les fermes ayant les effets les plus positifs sur l’environnement sont celles qui perçoivent le moins d’aides de la PAC par hectare. En plus d’être un système inégalitaire, la PAC finance essentiellement les exploitations les plus polluantes, et les impacts environnementaux sont considérables.

 

La PAC : une véritable opportunité pour instaurer une agriculture durable et écologique

Des réformes insuffisantes par le passé

Certaines tentatives ont été faites pour réformer la PAC et pour la rendre plus durable et plus verte. Au premier pilier, qui concerne les aides directes, s’est ajouté un second pilier qui a pour objectif de contribuer au développement rural. On y retrouve des aides pour l’agriculture biologique et des mesures agro-environnementales. Mais les montants de ce second pilier sont bien plus faibles que ceux du premier, et les Etats doivent participer au financement. Autrement dit, ils ne peuvent obtenir du budget européen que s’ils mettent également de l’argent de leur poche. Certains Etats membres se désengagent donc vis-à-vis des mesures de ce second pilier. C’est ce que le gouvernement français a fait à partir de 2017 sur les aides pour l’agriculture biologique.

Une mesure de “verdissement” a également été mise en place, avec un certain nombre de critères à respecter pour les agriculteurs. Or, ces critères sont très loin d’être assez ambitieux ! En effet 95% des agriculteurs remplissaient déjà les critères au moment même où la mesure a été mise en place. Les conséquences ont donc été minimes (pour ne pas dire inexistantes) en termes de protection de l’environnement.

Pourtant, avec 363 milliards d’euros de budget au total et 64 milliards en France, la PAC pourrait redessiner notre agriculture moderne et promouvoir des systèmes de production plus équitables et respectueux de notre environnement.

Située en Vendée, le GAEC (Groupement agricole d’exploitation en commun) Ursule s’étend sur près de 200 hectares et compte 5 associés. On y retrouve bovins et volailles, ainsi qu’une grande variété de céréales et d’oléo-protéagineux. © Elsa Palito / Greenpeace

Nos demandes pour la prochaine réforme

La prochaine réforme de la PAC doit permettre à l’agriculture, et en particulier à l’élevage, de passer d’un modèle industriel à un modèle écologique. Plus spécifiquement, la prochaine PAC doit répondre à un certain nombre d’attentes :

  • Revoir le système des aides directes, qui sont fournies aux agriculteurs en fonction des surfaces qu’ils possèdent, indépendamment de ce qu’ils produisent et de la manière dont ils le produisent. Or, l’argent public ne doit plus rémunérer les pratiques polluantes.
  • Rémunérer et inciter les pratiques vertes. Le système actuel doit être remplacé par un système où les aides publiques dépendent systématiquement de facteurs sociaux et environnementaux bien spécifiques et ambitieux. La PAC doit inciter à la transition de l’agriculture industrielle et permettre le maintien des systèmes les plus vertueux, en particulier de l’agriculture biologique.
  • Favoriser les filières qui émettent le moins de gaz à effet de serre. Aujourd’hui, elles sont pourtant moins soutenues que les autres. Il faut en particulier aider les secteurs des fruits et légumes frais ainsi que celui des légumineuses.

Citoyen-nes : que faire pour agir ?

Chacun / chacune peut agir pour limiter l’impact environnemental de notre système agricole. Il s’agit tout simplement de changer ses habitudes de consommation : en diminuant la quantité de viande et de produits laitiers au profit de produits issus de l’élevage écologique, en privilégiant les circuits courts, l’agriculture biologique et les produits frais, non transformés et de saison.

Vous pouvez également vous engager auprès d’une association pour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP), ou bien interpeller le député européen de votre circonscription sur le sujet de la Politique agricole commune.

Bétail dans une ferme écologique au Kenya

Une vache et son veau dans une ferme écologique au Kenya.  
© Cheryl-Samantha Owen / Greenpeace