Du 29 mai au 2 juin 2023, le comité de l’ONU chargé de négocier l’adoption d’un traité international contre la pollution plastique s’est réuni à Paris. Il y a urgence. La planète étouffe sous nos déchets plastiques. Cette pollution peut être visible à l’œil nu, par exemple sur nos plages ou dans nos rues, mais aussi bien plus insidieuse, nuisant à notre santé, aggravant les inégalités Nord-Sud, détruisant la biodiversité et alimentant la crise climatique… À qui profite le crime ? Pourquoi le traité en négociation est-il une occasion inespérée de mettre un terme au fléau du plastique ?

Océans - Toxiques

Plastique : un traité mondial pour stopper ce fléau

Du 29 mai au 2 juin 2023, le comité de l’ONU chargé de négocier l’adoption d’un traité international contre la pollution plastique s’est réuni à Paris. Il y a urgence. La planète étouffe sous nos déchets plastiques. Cette pollution peut être visible à l’œil nu, par exemple sur nos plages ou dans nos rues, mais aussi bien plus insidieuse, nuisant à notre santé, aggravant les inégalités Nord-Sud, détruisant la biodiversité et alimentant la crise climatique… À qui profite le crime ? Pourquoi le traité en négociation est-il une occasion inespérée de mettre un terme au fléau du plastique ?

Plastique : quels impacts sur l’environnement et sur notre santé ?

Chaque étape du cycle de vie du plastique est nocive pour l’environnement et notre santé, de l’extraction des matières premières au traitement des déchets, en passant par la transformation et l’utilisation du produit plastique et des emballages.

Une fois dans la nature, le plastique se dégrade en particules de microplastique qui se retrouvent absolument partout, dans nos océans, dans les estomacs des animaux marins, mais aussi jusqu’en Antarctique. Récemment, des études scientifiques ont montré que les microplastiques colonisent nos organes et coulent dans nos veines.

À ce stade, vous vous demandez sûrement comment et pourquoi on en est arrivé là ? C’est du côté de l’origine même du plastique qu’il faut chercher…

Le plastique n’est qu’un combustible fossile déguisé

A Bangkok (Thaïlande), un canal submergé par les déchets plastiques. © Chanklang Kanthong / Greenpeace

Il faut savoir que 99 % du plastique est fabriqué à partir de combustibles fossiles, notamment de pétrole. Il n’y a pas de hasard : nombre de grandes compagnies pétrolières et gazières possèdent, exploitent ou investissent dans des infrastructures de production de plastique. C’est le cas par exemple de TotalEnergies qui, en pleine urgence climatique et en pleine crise de la pollution plastique, s’apprête à construire une usine géante de plastique en Arabie saoudite, et qui, en Belgique, “noie des villes” sous des billes de plastique.

Le rôle des géants pétroliers dans la pollution plastique est de plus en plus montré du doigt. C’est d’ailleurs à ce titre que l’État de Californie a décidé, l’an dernier, de les poursuivre en justice.

D’après les prévisions de l’Agence internationale de l’Énergie (AIE), la production pétrochimique mondiale devrait augmenter de 60 % d’ici 2050… et devenir ainsi le principal débouché du pétrole, devant les transports. Il n’y a pas de hasard. L’industrie n’a donc aucun intérêt (financier) à ce que la production de plastique soit freinée.

Mais alors, on fait quoi face à la pollution plastique ?

Le recyclage, fausse bonne idée ?

Le recyclage, même s’il est essentiel, n’est pas la solution. En effet, seuls 9 % des plastiques produits à ce jour dans le monde auraient été recyclés, et la plupart de nos déchets plastiques finissent à l’étranger, non sans conséquences sur les populations locales et l’environnement. De plus, le recyclage ne doit pas être perçu comme le remède miracle, car il peut servir d’alibi au tout-jetable (“si c’est recyclable, on peut continuer à produire et acheter sans limite”) et a tendance à faire culpabiliser les consommateurs et consommatrices au lieu de responsabiliser les multinationales qui continuent de produire des plastiques et d’engranger des profits.

Des villageois ramassent des déchets plastiques dans une décharge sauvage, à proximité d’une usine de recyclage de papier, qui importe des papiers usagés contenant des éléments en plastique, à Sumengko, Surabaya, en Indonésie.

Quand la baignoire déborde, la première chose à faire est de fermer le robinet ! Avec les plastiques, c’est pareil, il faut prendre le problème à sa source. Et comme pour les crises environnementale et climatique, les gestes individuels de recyclage ou l’interdiction des plastiques à usage unique, quoique tous deux essentiels, ne pourront pas à eux seuls mettre fin au fléau du plastique. Ce qu’il faut, c’est changer de modèle économique.

Un traité mondial contre le plastique, maintenant !

À problème mondial, solution mondiale. Les grandes entreprises, qu’elles soient dans la pétrochimie, la fabrication de soda ou de produits alimentaires, doivent être contraintes par le droit de cesser de nous inonder avec leurs emballages plastiques. Les Nations unies ont donc organisé du 29 mai au 2 juin la deuxième session de négociations en vue d’adopter, avant fin 2024, un traité international contre la pollution plastique.

Comme lors de la première session de négociations qui s’était tenue en Uruguay fin 2022, certains lobbys et États, notamment de gros producteurs de pétrole alliés de l’industrie pétrochimique, ont joué les trouble-fête pour défendre le statu quo et préserver leurs profits. Heureusement, après deux jours de querelles stériles destinées à affaiblir le texte du futur traité et à ralentir les négociations, les discussions ont pu reprendre sur le fond du problème. Un avant-projet de texte sera rédigé par le comité d’ici à la troisième session, qui se déroulera au Kenya à l’automne.

Pour que ce traité soit véritablement efficace, il devra s’attaquer au problème à la source, c’est-à-dire à la production elle-même de plastique, et englober les mesures suivantes :

  • Mettre fin à la pollution engendrée par le plastique tout au long de son cycle de vie (de l’extraction des matières premières nécessaires à sa fabrication jusqu’à son élimination), pour protéger l’environnement et la santé humaine.
  • Plafonner immédiatement et réduire progressivement la production de matières plastiques, et éliminer progressivement la production de plastique vierge (non transformé).
  • Assurer une transition juste et inclusive vers une économie à faible émission de carbone, sans déchets, sans produits toxiques et basée sur la réutilisation.
  • Veiller au respect des droits humains, à la réduction des inégalités, à la santé humaine et à l’environnement, et préserver les intérêts des communautés les plus touchées.

La bataille est donc engagée et Greenpeace reste mobilisée, en France comme partout dans le monde, pour mettre la pression sur les responsables politiques et économiques afin de mettre un terme au fléau du plastique.