Huile de palme : jusqu’où le gouvernement défendra Total ?

Le gouvernement s’acharne à défendre Total

Total mène un lobbying éhonté depuis un an pour conserver une fiscalité avantageuse sur l’huile de palme, ce qui a conduit la France à contresens sur la protection des forêts. L’enjeu pour Total : la raffinerie de La Mède, près de Marseille, autorisée par Nicolas Hulot à importer jusqu’à 650 000 tonnes d’huile de palme par an. Soit une hausse de plus de 60 % du total de l’huile de palme consommée en France ! Le plus fou : cela se fait avec des subventions publiques.
Alors que l’Assemblée nationale a voté en décembre 2018 la fin de la niche fiscale pour le 1er janvier 2020, contre l’avis du gouvernement, Total et Emmanuel Macron déploient une énergie folle pour rétablir l’avantage fiscal sur l’huile de palme. Nous en sommes pour l’instant à trois tentatives :

 

L’huile de palme dans les agrocarburants : une fausse solution

Si les responsables économiques et politiques sont parvenus à installer dans le langage courant le terme de “biocarburants”, donnant l’impression que les automobilistes font du bien à la nature en faisant le plein, le terme est plus que trompeur. Les agrocarburants, c’est leur vrai nom, sont un cauchemar pour les forêts. Ils sont produits à partir de matières végétales, dont l’huile de palme. Pour la produire, des forêts tropicales entières sont dévastées, notamment en Indonésie, où l’équivalent d’un terrain de football est massacré toutes les 25 secondes. Ces destructions libèrent tout le carbone que retiennent les forêts, qui ne peuvent plus jouer leur rôle de régulation. Mécaniquement, l’effet de serre augmente et le dérèglement climatique s’aggrave. La culture industrielle de l’huile de palme cause aussi d’importants incendies, qui menacent les populations locales ainsi que la biodiversité : orang-outans, tigres, éléphants…

 

 

Bioraffinerie de Total : la déforestation “mede” in France

La majeure partie de l’huile de palme utilisée à la raffinerie Total de La Mède, près de Marseille, n’est pas durable. Elle est contaminée par des huiles qui ne sont pas certifiées et dont la provenance est parfois illégale, voire inconnue. C’est ce que nous avons révélé le 29 octobre dans le rapport “Total carbure à la déforestation”, après une enquête d’investigation menée sur la chaîne d’approvisionnement de Total, en Indonésie. Le même jour, plus de cinquante activistes de Greenpeace ont bloqué la raffinerie de la Mède en s’introduisant notamment à l’intérieur du site Seveso pour dérouler une grande banderole qui dénoncent la déforestation importée par Total.

 

 

La vigilance reste de mise

Le soutien décomplexé du gouvernement à Total montre le peu de cas que fait Emmanuel Macron des forêts et du climat. Tout aussi grave, il bafoue le fonctionnement démocratique : les parlementaires ont voté pour que l’huile de palme soit moins rentable pour Total, et cette décision doit être respectée. Le chantage de Total ne masque pas la vérité : il faut arrêter de saccager la planète, et les solutions ne demandent qu’à être mises en place. Il faut faire appliquer la Stratégie Nationale de Lutte contre la Déforestation Importée, supprimer les avantages fiscaux aux activités polluantes, abandonner les projets routiers, ou encore développer les transports en commun et les mobilités douces. Mais sûrement pas encourager des projets destructeurs comme celui de La Mède. Notre combat contre cette “bioraffinerie” et contre la déforestation importée se jouera notamment au tribunal : nous suivons de près la procédure judiciaire lancée en juillet 2018 aux côtés d’autres associations, avec un recours contre l’autorisation préfectorale de la raffinerie de Total à La Mède.

La bataille pour les forêts continue et nous ne lâcherons rien !

 

Crédit photo : Ulet Ifansasti