Thon rouge : l'Iccat, test grandeur nature pour les déclarations françaises suite aux accords de Nagoya sur la biodiversité

Océans

Paris, le 8 novembre 2010 – Cet après-midi Chantal Jouanno, secrétaire d’État à l’Écologie, a reconnu qu’afin de respecter l’engagement de l’Union européenne pris la semaine dernière à Nagoya, l’Iccat doit donner 100 % de chance de reconstitution du stock de thon rouge d’ici à 2020. Autrement dit, l’Iccat, qui se réunit à Paris du 17 au 27 novembre, doit fermer la pêche industrielle dès l’année prochaine.

« Cette attitude cohérente de Chantal Jouanno tranche avec la position française officielle annoncée par Bruno Le Maire qui défend le maintien du quota actuel, ne laissant ainsi que 63 % de chance au stock de se reconstituer d’ici à 2020. Le ministre de l’Agriculture et de la Pêche continue de soutenir une poignée de pêcheurs industriels au détriment de la survie du thon rouge, analyse Pascal Husting directeur général de Greenpeace France. En cette année de la biodiversité, l’Union européenne s’est engagée à ce que tous les stocks de poissons soient exploités de façon durable d’ici à 2020. Pour sauver le thon rouge, espèce emblématique aujourd’hui menacée, la fermeture de la pêche à la senne est indispensable. »

La France pas dans les meilleures dispositions pour négocier…

L’Union européenne joue un rôle clé au sein de l’Iccat et les différents pays sont encore en train de statuer sur une position commune sur l’avenir de la pêche au thon rouge. Hier, un consortium de journalistes d’investigation a publié une étude sur cette pêcherie intitulée « Looting the Seas » (consultable ici : www.icij.org)

Cette étude épingle sans nuance la France, les thoniers senneurs français et le ministère de l’Agriculture et la Pêche qui ont laissé se développer un véritable marché noir sur les thons rouges pêchés illégalement. Transgresser les réglementations, dépasser les quotas de pêche étaient des pratiques courantes avant 2007. L’étude démontre aussi que depuis 2008 les contrôles mis en place restent inefficaces notamment à cause de nombreux « trous » dans le système de traçabilité de l’Iccat.

La France torpille les négociations européennes

« Depuis le début des négociations européennes, la France, via Bruno Le Maire, soutient coûte que coûte les pêcheurs industriels en prônant le statu quo sur le quota de pêche alors que la Commission européenne propose une baisse drastique, indique François Chartier chargé de campagne Océans pour Greenpeace. Avec ces nouvelles révélations sur les agissements illégaux des pêcheurs et la prise de position forte de Chantal Jouanno, la France ne peut plus continuer de défendre une position pro-pêcheurs industriels en vue de l’Iccat. »

Cela fait plusieurs semaines que Greenpeace demande à Bruno Le Maire de s’engager en faveur de la protection du thon rouge : www.greenpeace.org/thon-rouge

Jouanno/Le Maire : qui va arbitrer ?

Le désaccord sur la pêche au thon rouge au sein du gouvernement rappelle le précédent de la Cites, en mars dernier. Bruno Le Maire s’était positionné contre une fermeture du commerce international du thon rouge et le ministère de l’Écologie avait, lui, défendu la fermeture de cette pêcherie. C’est finalement cette dernière position que la France avait soutenu…

« Ce nouveau conflit interne montre que sur les questions de biodiversité et de respect de ressources naturelles, Bruno Le Maire se place toujours du mauvais côté. Pour rester cohérente avec ses engagements internationaux, la France doit être unie pour sauver le thon rouge. Il faut qu’au plus haut niveau de l’État ce conflit soit arbitré en faveur de la sauvegarde de l’espèce », conclut François Chartier.