Loi de transition énergétique et nucléaire: le travail n’est pas fini !
Paris, le 14 octobre 2014 – L’ Assemblée nationale a voté la loi de transition énergétique. Ce texte illustre une évolution culturelle majeure : la remise en cause de la suprématie du nucléaire, en prévoyant la réduction de sa part dans le mix électrique à 50% d’ici 2025. La levée d’un tabou vieux de plus de soixante ans.
Mais elle laisse un goût d’inachevé. Elle se contente de fixer cet objectif répété à l’envie depuis plus de deux ans… sans fournir les outils concrets pour l’atteindre. La plus importante loi du quinquennat promise par François Hollande n’est pas au rendez-vous. Au-delà de l’absence de la fermeture de Fessenheim, renoncement le plus flagrant, la dynamique de fermeture de réacteurs n’est pas encore acquise.
« Ce texte est un début plus qu’un aboutissement et il ne tranche pas entre le nucléaire et une véritable transition énergétique basée sur les renouvelables« , analyse Cyrille Cormier, chargé de campagne énergie pour Greenpeace France. « Le mécanisme mis en place pour décider de la politique énergétique – la programmation pluriannuelle – peut servir autant à réduire la part du nucléaire qu’à la préserver. L’État ne s’est pas donné jusqu’à présent le pouvoir d’imposer à EDF la fermeture de réacteurs, saura-t-il le faire dans le cadre de cette future programmation ? »
La France va vouloir se présenter avec cette loi dans les mois à venir comme un élève modèle, en tant qu’organisateur de la Conférence de Paris sur le climat en décembre 2015. Mais cette image est un faux-semblant, car sa volonté de préserver un nucléaire fort et d’en faire la promotion est un frein au développement des renouvelables et à la vraie transition énergétique.
Le nucléaire, contre vents et marées
L’ironie du sort veut que ce texte de loi soit voté le jour de l’ouverture à Paris du World Nuclear Exhibition, grande « foire internationale » de l’énergie nucléaire. Ce salon se tient dans un contexte où le développement de l’énergie nucléaire a fortement ralenti, surtout en comparaison à l’explosion mondiale des énergies renouvelables.
« On pourrait voir une pure coïncidence dans cette correspondance de date« , poursuit Cyrille Cormier. « Mais ce salon, c’est celui d’une filière, d’un lobby et d’intérêts économiques qui ont pesé pour affaiblir la loi. Ceci va à l’encontre du bon sens économique, quand on voit le raz-de-marée mondial des énergies renouvelables, plus compétitives, plus sûres, plus créatrices d’emploi et seules à même de lutter efficacement contre les dérèglements climatiques. »
Le vieillissement devient officiellement un problème
Autre avancée culturelle, la loi acte que le vieillissement des réacteurs nucléaires pose un réel problème de sûreté et de coût. Le processus de réexamen de sûreté à 40 ans guidé par l’ASN, incluant une enquête publique, est à ce titre une nouveauté.
« Tous les réacteurs vont connaître des coûts de travaux faramineux au-delà de 40 ans« , explique Cyrille Cormier. « La loi laisse la possibilité à EDF de fermer ou de prolonger un réacteur sans tenir compte de l’intérêt général et de la sûreté. Désormais, charge à l’ASN de savoir imposer ses vues lors de ces rendez-vous. »