Inde : un mois pour sauver Greenpeace de la fermeture

Climat

Paris, mercredi 6 mai 2015 – Il ne reste qu’un mois à Greenpeace Inde pour assurer sa survie après les vastes mesures répressives prises par le gouvernement indien contre la société civile.

Selon son directeur général, l’ONG indienne ne dispose plus que de 30 jours de trésorerie pour couvrir les salaires de son personnel et ses frais de fonctionnement.

Des comptes bloqués pour asphyxier l’association

La décision du ministre de l’Intérieur, Rajnath Singh, de geler les comptes bancaires nationaux de Greenpeace Inde pourrait non seulement faire perdre leur emploi à 340 salariés de l’organisation, mais aussi mettre brutalement un terme à ses campagnes sur le développement durable, la justice environnementale et les énergies propres et abordables.

Le directeur général de Greenpeace Inde, Samit Aich, s’est adressé hier aux membres de son équipe pour les préparer à la fermeture imminente de l’organisation, après 14 ans de présence dans le pays.

« Je viens de prononcer l’un des discours les plus difficiles de ma vie, mais mes collaborateurs méritent de connaître la vérité. Nous n’avons plus qu’un mois pour empêcher Greenpeace Inde de fermer complétement et lutter contre la décision injustifiable du ministère de l’Intérieur de bloquer nos comptes nationaux ».

Greenpeace France a adressé un courrier à l’Ambassadeur d’Inde en France, lui demandant un rendez-vous afin de pouvoir répondre aux accusations portées contre Greenpeace Inde. Le courrier souligne notamment la transparence financière de l’organisation en Inde et indique que ces attaques constituent une violation des droits à la liberté d’expression et d’association garantis par la Constitution indienne et par le droit international. Greenpeace France compte également interpeller le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius sur ce sujet.

« La fermeture forcée de Greenpeace Inde ne serait pas qu’un symbole catastrophique pour ce pays. Ce serait surtout la fin de campagnes ambitieuses et d’une véritable vision d’un avenir respectueux de l’environnement et des personnes. Les actions de Greenpeace ont déjà permis des avancées majeures, par exemple en protégeant récemment les forêts de Mahan de l’exploitation de charbon, mais également des solutions positives pour les Indiens les plus pauvres », souligne Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France.

« J’ai eu la chance de visiter il y a quelques semaines le village de Dharnaï, le premier en Inde où, grâce à une coalition d’associations menée par Greenpeace, toute l’électricité est produite à partir de l’énergie solaire. Après s’être rendu sur place, Nitish Kumar, le ministre en chef, s’est lui-même engagé à mettre en place le même système dans 48 villages avant d’élargir le concept à 800. Avec ce projet, Greenpeace permet aux enfants de bénéficier d’une meilleure éducation et contribue à la relance économique du village. Comment pourrait-on nous en faire le reproche ? ».

Aujourd’hui Greenpeace, demain d’autres membres de la société civile ?

Le gouvernement indien multiplie depuis plusieurs mois les attaques contre Greenpeace Inde. Suite aux allégations de financements étrangers, Greenpeace Inde a fait l’objet d’une série de sanctions imposées par le ministère de l’Intérieur, sanctions qui ont toutes été annulées par la Haute Cour de Delhi. La dernière en date bloque l’accès à des comptes bancaires nationaux financés par les dons de plus de 77 000 citoyens indiens, qui représentent 68% des revenus de l’association.

En mars dernier, la Haute Cour de Dehli avait annulé l’interdiction de voyager signifiée à Priya Pillai, responsable de campagne pour Greenpeace Inde.

Greenpeace Inde prépare un nouveau recours judiciaire, mais Samit Aich craint que le processus ne se prolonge bien delà du 1er juin, date à laquelle les réserves de trésorerie pour les salaires et les frais de fonctionnement seront épuisées.

« La question est de savoir pourquoi 340 personnes risquent de perdre leur emploi ? Est-ce parce ce que nous avons parlé de thé sans pesticides, de pollution de l’air, et d’un avenir plus propre et plus juste pour tous les Indiens ? », poursuit Samit Aich.

Greenpeace Inde a demandé au ministère de l’Intérieur de reconnaître l’impact de sa décision. « Le ministre de l’Intérieur est en train de nous tuer à petit feu, parce qu’il sait qu’une interdiction pure et simple est inconstitutionnelle. Nous lui demandons de reconnaitre que sa véritable intention est de fermer Greenpeace Inde et de nous faire taire. Son attaque arbitraire pourrait créer un précédent très dangereux: chaque membre de la société civile indienne est maintenant sur la sellette », conclut Samit Aich.