Rapport ‘Sustainability and climate’ de TotalEnergies : un déballage de greenwashing ‘as usual’

TotalEnergies a présenté cet après-midi son rapport annuel ‘Sustainability and climate’, point d’étape de la stratégie climat de la major pétro-gazière censée lui permettre d’atteindre la neutralité carbone en 2050.

Pour Edina Ifticene, chargée de campagne Énergies fossiles chez Greenpeace France : “Comme dans un monde parallèle ignorant la synthèse du GIEC publiée hier, TotalEnergies a déballé son greenwashing habituel, intégrant le gaz comme une énergie bas carbone et faisant la promotion de mesures totalement insuffisantes pour réduire ses émissions. Aucune nouvelle annonce pour mettre la major sur le chemin de la neutralité carbone et de la lutte contre le changement climatique”.

Un modèle économique toujours orienté massivement vers les énergies fossiles
Malgré ses efforts de communication pour promouvoir sa stratégie climat, la grande majorité des investissements de TotalEnergies, prévus pour la période 2023 et 2030, sont principalement fléchés vers les énergies fossiles :

  • 30% de ses investissements dans les nouveaux projets fossiles,
  • 37% dans le maintien des projets fossiles actuels
  • Et 33% dans les énergies bas carbone mais qui comprennent l’électricité produite à partir de gaz, la vente de gaz et les énergies renouvelables, selon un détail non communiqué par TotalEnergies.

Pour la production des énergies en 2030, le groupe prévoit 40% de production de gaz naturel liquéfié, 40% de production de pétrole et 20% de production d’électricité (dont la production d’électricité à partir de gaz, qui représentait les ⅔ en 2022). En résumé, plus de 90% de la production de TotalEnergies reposera encore sur les énergies fossiles en 2030.

Cette annonce intervient au lendemain de la nouvelle publication du GIEC, qui a souligné que les infrastructures de combustibles fossiles existantes et planifiées nous conduisent d’ores et déjà vers un dépassement du seuil de réchauffement de 1,5 °C. Ignorant les alertes des scientifiques, TotalEnergies continue d’investir dans de nouvelles bombes climatiques comme le projet EACOP alors que, comme le recommande l’Agence internationale de l’énergie, il faut dès maintenant cesser de développer tout nouveau projet pétrolier et gazier.

Le greenwashing du gaz présenté comme énergie bas carbone
Pour justifier des investissements massifs dans le gaz naturel liquéfié, extrêmement émetteur de méthane et au pouvoir réchauffant encore supérieur à celui du C02, la major n’a de cesse de le présenter comme une énergie bas carbone et de transition. C’est d’ailleurs l’objet même d’un recours pour pratiques commerciales trompeuses déposé par Greenpeace France, les Amis de la Terre et ClientEarth.

Comble de l’hypocrisie, les 5 milliards d’investissement prévus en 2023 dans les énergies bas carbone de la major comprennent la production d’électricité à partir d’énergies fossiles.

Nombre des projets gaziers de TotalEnergies font partie des pires projets fossiles actuels et sont très loin d’être des projets peu émetteurs comme vantés par la major. Aux Etats-Unis et en Argentine notamment, TotalEnergies développe des projets gaziers issus du gaz de schiste, désastre environnemental et sanitaire pour les populations environnantes. De plus, dans le contexte de la guerre en Ukraine, TotalEnergies détient toujours des parts dans Yamal LNG (20%), mégaprojet gazier situé dans l’Arctique russe et considéré comme une bombe climatique.

Une ambition dérisoire de réduction des émissions pour les scopes 1, 2 ainsi que pour le scope 3
Pour les scope 1 et 2, l’ambition du groupe est de passer de 40 Mt de CO2 en 2022 à moins de 38 Mt de CO2 en 2025, donc de réduire ses émissions d’environ 2 Mt de CO2. Une ambition dérisoire au regard des 428 Mt des émissions globales déclarées par le groupe, et très certainement largement sous-estimées. En novembre 2022, dans son rapport ‘Bilan carbone de TotalEnergies, le compte n’y est pas’, Greenpeace France publiait un nouveau calcul des émissions de GES du groupe pour l’année 2019, arrivant à un résultat près de quatre fois supérieur, soit 1,6 milliard, à celui annoncé par le groupe (455 Mt de CO2).

Pour le scope 3, les objectifs de la major sont surprenants : alors que les émissions globales de scope 3 sont estimées par le groupe à 389 Mt en 2022, l’objectif 2025 est de rester sous la barre des 400 Mt. “Où est l’ambition du groupe ici ?”, s’étonne Edina Ifticene.

Aussi, TotalEnergies fait le choix de mettre en place des objectifs de réduction des émissions du scope 3 uniquement pour le pétrole et assume de ne pas tenter de réduire les émissions de scope 3 du gaz, considérant qu’il représente une alternative au charbon.

“En quoi remplacer une énergie fossile par une autre dédouanerait TotalEnergies de réduire ses émissions en pleine urgence climatique ?, questionne Edina Ifticene. Cela démontre encore une fois le lobby de Total et des majors pétro-gazières pour faire passer le gaz pour une énergie verte, utile à la transition et à la sécurité des personnes. Le gaz est une énergie fossile dont les émissions doivent être réduites au même titre que celle du pétrole et du charbon”.