[Rapport] Déchets nucléaires : trop de coûts cachés et d’opacité pèsent sur la filière

Nucléaire

Au moins 90% des matières radioactives présentées comme “valorisables” par l’industrie sont en fait des déchets radioactifs qu’elle refuse d’assumer. Soit près de 300 000  m³ qui s’ajoutent à l’inventaire officiel de l’ANDRA, et un surcoût d’au moins 18 milliards d’euros pour leur gestion. Telle est l’une des conclusions du rapport intitulé A quel prix? Les coûts cachés des déchets nucléaires, publié par Greenpeace France au cœur du débat public sur la gestion des déchets nucléaires [1].

« Nous démontrons dans ce rapport que la crise des déchets nucléaires est largement sous-estimée alors même qu’aucune solution n’existe pour s’en débarrasser. Dans les faits, la distinction entre “matières” et “déchets” n’a pas lieu d’être puisque seule une infime partie des matières radioactives est ré-utilisée. Aussi quand l’industrie parle de ‘recyclage’, c’est du pur greenwashing », décrypte Alix Mazounie, chargée de campagne Énergie à Greenpeace France.

Le rapport déconstruit ce mécanisme rendu possible à cause d’une brèche dans la législation et détaille les conséquences qui en découlent en termes de volumes, de solutions de stockage et de coûts.

« Nos calculs nous ont permis d’estimer que les volumes de déchets de haute activité à vie longue (HA-VL) sont cinq à sept fois supérieurs aux chiffres officiels. Or il s’agit des déchets les plus radioactifs et les plus complexes à gérer puisqu’ils supposent une solution de stockage fiable pour des dizaines de milliers d’années ou plus. Cela signifie qu’il faudrait à minima doubler les dimensions du projet Cigéo à Bure, ce qui gonflerait d’autant plus la facture de ce chantier contesté et creuserait davantage la dette d’EDF. A l’heure où on parle de renationaliser les activités nucléaires de l’exploitant, ces coûts cachés pèseront à terme sur l’ensemble des Français et Françaises », ajoute Florence de Bonnafos, chargée de campagne Finances à Greenpeace France.

Alors que la Cour des comptes a pointé du doigt un chiffrage peu réaliste du projet Cigéo et l’opacité qui entoure la gestion des déchets, Greenpeace France réclame une opération transparence sur les coûts des déchets nucléaires.

Plus généralement, dans le cadre du débat public qui se poursuit jusqu’au 25 septembre, Greenpeace continue de porter les demandes suivantes :

  • Comptabiliser les « matières radioactives » non réutilisées dans la liste des déchets nucléaires d’EDF et prévoir plus de financements pour leur stockage.
  • Mettre un terme au retraitement du combustible usé, qui multiplie les risques.
  • Renoncer au projet d’enfouissement profond Cigéo et privilégier d’autres options, comme le stockage à sec en sub-surface.
  • Mettre fin aux transports nucléaires inutiles (notamment ceux liés au retraitement) et interdire les passages en zone de concentration urbaine.
  • En priorité : cesser de produire des déchets nucléaires en planifiant une sortie du nucléaire qui s’appuiera sur les économies d’énergie, l’efficacité énergétique et le développement d’énergies renouvelables, selon des scénarios compatibles avec la lutte contre le changement climatique.

le rapport est disponible ici 

Notes aux rédactions :

[1] Greenpeace participera à la réunion publique du mercredi 11 septembre 2019 organisée à Paris par la Commission nationale du débat public sur le thème “Économie des matières et déchets radioactifs : coûts, financement et garanties à long terme”.

[2]  En janvier 2019, Greenpeace a publié un précédent rapport intitulé La crise mondiale des déchets nucléaires, sur le risque de saturation en France et dans le monde.

[3] En novembre 2016, une étude de l’analyste financier AlphaValue pour Greenpeace France alertait déjà sur le sous-provisionnement par EDF des charges liés au démantèlement et à la gestion des déchets.