[Nucléaire] L’État français, via EDF, verse des centaines de millions d’euros à l’entreprise russe Rosatom
Ce matin, le Canard enchaîné dévoile qu’un tiers de l’uranium enrichi nécessaire pour faire fonctionner les centrales nucléaires françaises pendant un an provient de Russie. Depuis le début de l’année et malgré la guerre en Ukraine, la France a acheté 290 tonnes d’uranium enrichi à la Russie, pour 345 millions d’euros.
Le 29 novembre dernier, Greenpeace France documentait une nouvelle fois le déchargement, dans le port de Dunkerque, de dizaines de fûts d’uranium enrichi à destination des installations nucléaires françaises [1] du cargo Mikhaïl Dudin en provenance de Russie.
Pourtant, interrogée le 6 décembre par la députée Julie Laernoes sur l’opacité des pratiques de l’industrie nucléaire française et le niveau de dépendance de la France à la Russie pour faire fonctionner les centrales nucléaires françaises, Agnès Pannier-Runacher a menti par omission. Dans sa réponse, la ministre de la Transition énergétique a indiqué que la France n’importait pas d’uranium naturel, omettant sciemment de mentionner l’uranium enrichi importé massivement de Russie [2].
“En totale contradiction avec son soutien public affiché à l’Ukraine, l’État français finance discrètement Rosatom à hauteur de centaines de millions d’euros. Ces dépenses ont augmenté depuis le début de la guerre avec un triplement des importations d’uranium enrichi. Rosatom, c’est l’entreprise fondée par Vladimir Poutine, la même qui occupe illégalement la centrale de Zaporizhia et gère le nucléaire civil et militaire du régime russe. C’est l’uranium de la honte qui est utilisé pour faire fonctionner nos centrales nucléaires. Agnès Pannier-Runacher doit mettre en cohérence le soutien du gouvernement au peuple ukrainien et demander aux acteurs de la filière nucléaire de mettre immédiatement fin aux contrats avec Rosatom”, déclare Pauline Boyer, chargée de campagne Transition énergétique et Nucléaire pour Greenpeace France.
Greenpeace demande l’arrêt définitif de tout commerce nucléaire avec la Russie et la résiliation de tous les contrats en cours entre l’industrie nucléaire française et Rosatom ainsi que ses filiales, en commençant par les contrats concernant le commerce d’uranium entre Tenex, filiale de Rosatom, et respectivement EDF et Orano.
[1] Le 29 novembre, le constructeur de centrales nucléaires et fournisseur de combustible Framatome, filiale d’EDF, a confirmé auprès de l’AFP qu’il s’agissait d’une « livraison de matière pour la fabrication de combustibles nucléaires » à destination de son usine de Romans-sur-Isère (Drôme). Ce combustible est destiné ensuite à ses « clients et notamment le parc nucléaire français », a-t-il précisé.
[2] Pour servir de combustible dans une centrale nucléaire, l’uranium naturel doit être transformé en uranium enrichi. Il faut 7800 tonnes d’uranium naturel pour obtenir 1080 tonnes d’uranium enrichi, soit la quantité nécessaire au fonctionnement annuel des 56 centrales nucléaires françaises. C’est cet uranium enrichi en Russie que la France achète en grande quantité à Rosatom.