Militants de Greenpeace en procès à Cherbourg : jugés pour avoir eu raison ?

Climat

Cherbourg, 1er février 2011 – 16 militants de Greenpeace ainsi que l’association, représentée par son directeur général Pascal Husting, sont convoqués demain mardi 1er février au tribunal de grande instance de Cherbourg (Manche), pour entrave à la circulation de trains. Les faits remontent à décembre 2009 et janvier 2010 : à plusieurs reprises, des militants écologistes avaient dénoncé le passage de convois de déchets nucléaires affrétés par Areva et à destination de la Russie.

« En dénonçant ces scandaleux transports de déchets nucléaires français vers la Russie, ces citoyens ont contribué de façon décisive à l’arrêt anticipé de ce trafic qui aura duré près de quarante ans, déclare Yannick Rousselet, responsable de la campagne Nucléaire de Greenpeace France. L’histoire leur a donné raison et grâce à eux, entre autres, Areva ne peut plus continuer de considérer la Russie comme une poubelle radioactive. »

Les militants et Pascal Husting seront présents dès 13h devant le TGI de Cherbourg. Une quarantaine de salariés et bénévoles de l’association seront sur place pour les soutenir.

La désobéissance civile en procès

Depuis sa création en 1971, Greenpeace utilise la désobéissance civile non-violente pour dénoncer les atteintes à l’environnement et proposer des solutions.

« Ainsi, par exemple, l’engagement de quelques citoyens à s’interposer physiquement et de façon pacifique a été décisif pour permettre l’interdiction des rejets en mer de déchets nucléaires en 1993, rappelle Pascal Husting, directeur général de Greenpeace France. En France, face à un État et des élites obsédés par le nucléaire et qui empêchent tout débat, Greenpeace et le mouvement anti-nucléaire sont souvent amenés à mettre en place des actions de confrontation non-violentes. Celles-ci sont légitimes, même si elles sont illégales. »

Greenpeace considère que les actes de désobéissance civile sont un des outils qui restent aux citoyens pour participer aux débats, voire se faire entendre. Comme le rappelle l’historien américain Howard Zinn, « ces protestations « hors la loi » ne sont pas une atteinte à la démocratie, mais sont essentielles à la démocratie ».

Petit rappel historique (pour plus de détails, voir http://bit.ly/dSFibd )

L’histoire commence en réalité en 1984 quand, suite au naufrage du cargo Mont Louis au large de Zeebrugge (Belgique), Greenpeace découvre que le navire transportait des conteneurs d’hexafluorure d’uranium et met au jour un scandale : la France exporte des déchets nucléaires en Russie depuis 1972.

Greenpeace prend position contre ce trafic et s’interpose à plusieurs reprises. En octobre 2009, la diffusion sur Arte de l’enquête de Laure Noualhat et Éric Guéret, « Déchets : le cauchemar du nucléaire » relance la polémique. N’obtenant aucune explication satisfaisante de la part d’Areva, Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’Écologie et de l’Énergie, saisit le Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire qui ouvre une enquête. Mais les exportations de déchets nucléaires continuent…

Greenpeace enchaîne les actions sur le terrain pour dénoncer publiquement la poursuite de ce trafic et demander l’arrêt immédiat des expéditions de déchets vers la Russie. Fin mai 2010, Greenpeace révèle qu’Areva va prématurément cesser d’exporter ces déchets nucléaires : le contrat liant normalement Areva et l’agence atomique russe Rosatom jusqu’à fin 2014, sera interrompu le 11 juillet 2010, stoppant un trafic qui a duré près de quarante ans.