Greenpeace France dénonce une tentative répétée de « bâillon fiscal »
Alors que ce lundi 20 octobre a marqué le début de l’examen du budget 2026 en commission des finances à l’Assemblée nationale, des amendements visant à asphyxier financièrement les associations font une nouvelle fois leur retour. Lundi, l’amendement n°I-CF261 de Corentin Le Fur a été adopté en commission des finances. Greenpeace France dénonce des « amendements bâillons » qui menacent directement les libertés associatives et, au-delà, le fonctionnement démocratique lui-même.
Depuis 2022 (pour le budget 2023), un même scénario se répète : à chaque débat budgétaire, des parlementaires tentent de réduire au silence les associations par la voie financière. Leur objectif : supprimer la défiscalisation des dons accordée aux citoyen·nes qui soutiennent des associations reconnues d’intérêt général, en élargissant le champ des infractions susceptibles de supprimer ces avantages fiscaux. Une mesure qui aurait pour effet de bâillonner une diversité d’associations, notamment celles qui documentent les conséquences de l’industrialisation de l’agriculture ou plus largement celles qui ont recours à la désobéissance civile, comme Greenpeace France.
Cet amendement vise à élargir la liste des infractions pénales susceptibles de priver les associations reconnues d’utilité publique du bénéfice pour leurs adhérents d’une réduction d’impôt. Cette nouvelle liste inclut par exemple « l’entrave à l’activité économique » , « la provocation par voie de presse » ou encore « la diffamation ».
L’amendement cible ainsi les moyens d’actions des associations. Il vise clairement à museler les lanceurs d’alerte ou simples critiques, via la dénonciation publique ou des actions de désobéissance civile non-violente, d’un système économique qui met le profit avant l’intérêt général. Une association pourrait ainsi se voir automatiquement privée d’une large part de ses ressources financières pour avoir publiquement dénoncé de graves atteintes à l’intérêt général.
Un coup porté aux libertés associatives
Pour des organisations comme Greenpeace France, financées exclusivement par des particuliers et refusant tout financement d’entreprises ou de l’État, une telle mesure aurait des conséquences majeures sur leur stabilité financière, dans un contexte de dégradation financière généralisée du mouvement associatif.
En privant les donateurs de leur avantage fiscal, ce texte fragiliserait la pérennité de nombreuses associations citoyennes, culturelles, sportives ou environnementales – et, in fine, la liberté d’expression.
Greenpeace refuse d’être réduite au silence
Greenpeace agit, informe, alerte et propose des solutions face à la crise écologique et sociale. Ces amendements, d’autant plus inquiétants qu’ils ressurgissent chaque année, représentent une menace grave pour la démocratie et pour la liberté d’action associative. Depuis plusieurs années, une escalade préoccupante vise le monde associatif, notamment depuis la mise en place du Contrat d’engagement républicain et les tentatives de dissolution abusives, qui traduisent un durcissement du contexte répressif. L’adoption de ces amendements s’inscrirait dans cette logique répressive et porterait atteinte à de nombreuses associations, créant un précédent dangereux susceptible d’ouvrir la voie à d’autres attaques contre les libertés associatives.
Pour Apolline Cagnat, responsable juridique à Greenpeace France :
« Priver les associations de leurs ressources, c’est museler la critique et affaiblir les contre-pouvoirs citoyens. Si nous voulons préserver la vitalité démocratique, il est urgent de retirer cet amendement du projet de budget. »
Elle reprend : « Les associations, qu’elles soient écologiques, culturelles, sportives, paysannes ou de protection animale, font partie intégrante de notre démocratie. Le pouvoir législatif ne peut pas choisir quelles voix ont le droit d’exister, ni étouffer celles qui dérangent par le biais d’une asphyxie financière déguisée. »
Trois ans de tentatives pour museler la société civile
- 2022 : l’amendement déposé dans le budget a été rejeté grâce à une forte mobilisation citoyenne et associative.
- 2023 : l’amendement adopté en commission n’a finalement pas été intégré à la version finale du budget adoptée par le gouvernement via le 49.3.
- 2024 : la mesure revient, élargie et durcie. Elle a de nouveau été adoptée via deux amendements adoptés en séance publique par les députés, à deux voix près, suscitant une vague d’inquiétude dans tout le tissu associatif avant d’être rejetée lors du passage au Sénat.
Face à ce « bâillon fiscal » récurrent, Greenpeace France appelle les parlementaires à rejeter fermement et immédiatement toutes tentatives de bâillonner, par dépôt d’amendements existants et à venir, la liberté d’action des associations.
Greenpeace France appelle également les citoyennes et citoyens à se mobiliser pour défendre le rôle essentiel des associations dans la démocratie : soutenir des ONG, participer à la vie associative et faire entendre leur voix est plus que jamais nécessaire pour garantir transparence, justice et protection de la démocratie.