Gaz et pétrole de schiste : reculer pour mieux forer ?

Climat

Paris, 11 mai 2011 – Après un jour et demi de débats, l’Assemblée nationale vient d’adopter une proposition de loi qui interdit la fracturation hydraulique et ne ferme que très temporairement la porte à l’exploration et l’exploitation des gaz et pétrole de schiste sur le sol français. Un texte qui n’est à la hauteur ni des attentes des Français, ni des exigences environnementales.

Un dangereux calcul de court terme

En en restant à l’interdiction de la fracturation hydraulique – sans d’ailleurs définir ce dont il s’agit, ni détailler les problèmes que posent cette technologie –, les responsables politiques gèrent uniquement le court terme. Ils laissent les pétroliers revenir à la charge, d’ici quelques années, voire quelques mois, avec une nouvelle technologie. Celle-ci pourrait s’avérer tout aussi polluante et dangereuse que la fracturation. Sans que les gaz et pétrole de schiste en deviennent pour autant plus acceptables et respectueux de l’environnement !

De plus, l’abrogation des permis existants est soumise à la bonne foi des pétroliers, qui ont désormais quelques semaines pour tenter de convaincre le gouvernement qu’ils ne prévoient pas de recourir à la fracturation hydraulique.

Les députés se sont perdus en arguties techniques

Le débat qui a agité l’Assemblée nationale depuis deux jours a échoué à poser les bonnes questions. Il aboutit à la simple interdiction d’une technique, loin d’un refus définitif des hydrocarbures non conventionnels. Et pourtant, c’est bien de cela dont il devait s’agir !

Élus et membres du gouvernement ont perdu de vue l’objectif global pour s’embourber dans des arguties techniques. Et pour finir, personne n’a vraiment été capable de porter une position globale, qui permette de bannir une fois pour toutes :

– d’une part, l’exploration et l’exploitation de tous les hydrocarbures non conventionnels (gaz et pétrole de schiste, « tight gaz », gaz de houille, mais aussi offshore profond, etc.) ;

– et d’autre part, le recours à des techniques d’extraction trop dommageables pour l’environnement et la santé, comme la fracturation hydraulique.

Pas de remise en cause de notre modèle énergétique

La loi adoptée aujourd’hui par la majorité présidentielle n’engage en rien la France vers une nécessaire transition énergétique, qui nous libère de notre addiction aux énergies polluantes et de plus en plus coûteuses, et oriente notre société vers un modèle capable de répondre aux besoins de façon durable.

« La course effrénée vers le non conventionnel sous toutes ses formes se poursuit donc en France, avec cette porte laissée aujourd’hui ouverte à d’autres façons d’exploiter les gaz et pétrole de schiste, mais aussi des opérations de forage profond lancées en Guyane », déplore Anne Valette, en charge de la campagne Climat-énergie pour Greenpeace France. « Nos responsables politiques oublient l’essentiel : quelles que soient les technologies développées demain, la crise climatique nous interdit d’exploiter ces hydrocarbures non conventionnels. Leur extraction et leur consommation impliquent de massives émissions de CO2 que la planète ne pourra supporter ! Les hydrocarbures non conventionnels, comme le pétrole, le charbon, le nucléaire sont des énergies du passé. Nous sommes à la croisée des chemins : ou nous poursuivons une fuite en avant absurde et vouée à l’échec ; ou nous engageons une transition énergétique vers un modèle moderne, décentralisé, renouvelable, peu consommateur en énergie et profitable à la fois du point de vue environnemental, sanitaire, économique et social. »