Hier, un vote décisif se déroulait au Parlement Européen : interdire ou non l

Océans

10 décembre 2013 : une journée décisive pour le chalutage en eaux profondes

Hier, un vote décisif se déroulait au Parlement Européen : interdire ou non la pêche en eaux profondes. Malheureusement, c’est une journée qui a mal commencé puisque le Parlement a fini par rejeter, après un vote serré où 9 voix auraient pu faire la différence, l’interdiction totale du chalutage profond et manque ainsi sa chance de protéger vraiment les fonds marins.

Choqués mais pas surpris par ce nouvel échec politique, nous nous préparions à transmettre cette information lorsque, en fin de journée, la Scapêche, armement du Groupement des Mousquetaires (Intermarché), annonçait renoncer à cette pratique que nous dénonçons depuis très longtemps. Décryptage d’un sujet et d’une journée pas comme les autres.

Santa Cristina - Bottom Trawler Tour 2005

Le chalutage en eaux profondes : un crime caché aux yeux de tous

En 2011, Greenpeace partait en campagne en mer pour dénoncer les dégâts de cette pratique de pêche, qui décime des espèces que l’on connaît à peine, qui génère des taux de rejets très importants, et qui n’est même pas rentable.

La pêche profonde est pratiquée entre 400m et 1500m de profondeur, là où la mer est sombre, silencieuse, et où les dommages causés par les filets raclant les fonds marins sont invisibles !

Nous avons mené l’enquête. Consultez nos dossiers d’investigation

Malgré la position de l’ONU et la très grande majorité des scientifiques condamnant cette pratique, le Parlement Européen a échoué à l’interdire, alors que les prises d’espèces profondes ne représentent qu’1,5% des espèces débarquées au sein de l’Union européenne. Insignifiante, donc, au niveau de ce qu’elle fournit en poissons, mais catastrophique pour l’environnement.

Aveuglement des politiques face à l’avis de plus de 750 000 citoyens

La pétition de l’association Bloom contre la destruction des fonds marins, mise en lumière par la bande-dessinée de Pénélope Bagieu, comptabilise plus de 750 000 signatures. 750 000 personnes qui se sont opposées à ce crime écologique qu’est le chalutage en eaux profondes.

La France est un des acteurs principaux de cette pêche en Europe, et pourtant, la flotte française de chalutiers profonds ne compte qu’une dizaine de bateaux. Ce qui s’est passé aujourd’hui n’est rien d’autre que le résultat d’une absence de stratégie et de projets pour la pêche en France. Une poignée d’industriels, et certains représentants officiels des pêcheurs ont su défendre le status quo d’une pêche productiviste, sans vision à long terme.

Le vote de la majorité des eurodéputés français, de droite comme de gauche, reflète la politique de Monsieur Cuvillier, ministre de la Pêche, et ancien maire de Boulogne sur Mer (un des deux ports français accueillant des chalutiers profonds). Il défend corps et âme un modèle de pêche industrielle destructrice au lieu de concentrer ses forces pour développer une activité de petite pêche artisanale produisant de la qualité, et dont les emplois ne sont pas délocalisables.

Des distributeurs qui vont plus vite que les décideurs européens

Alors que les choses se traînent du côté des décideurs européens, du côté des distributeurs il semble que le vent tourne. En effet, ces 10 derniers jours, nous avons assisté à une prise de conscience des supermarchés Casino, puis Carrefour, qui se sont engagés à ne plus commercialiser de poissons issus de la pêche en eaux profondes.

La Scapêche, premier armateur de pêche profonde, arrête de cibler les espèces vivant en eaux profondes

La nouvelle est tombée hier en fin de journée.
C’est un signe que la flotte des Mousquetaires a elle-même reconnu que ce modèle de pêche n’a pas d’avenir. Le déploiement par l’industrie du chalutage profond et d’un lobbying acharné pour sauver cette pratique leur a simplement permis de temporiser, se donnant ainsi la possibilité de réorienter les pratiques du groupe. Ceci prouve d’autant plus que le vote du Parlement Européen est un non-sens total.

D’ici la prochaine échéance politique, qui reste à déterminer mais qui peut encore faire changer les choses, il nous reste à user de notre pouvoir individuel, en privilégiant le choix des produits de qualité issus de la petite pêche, aux espèces de grands fonds.