5 milliards d’aides à Renault : quelles conditionnalités environnementales pour le secteur automobile ?

Après Air France, Renault va également bénéficier d’un soutien de l’Etat : cinq milliards d’euros, sous forme de prêts garantis. Ni le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, ni la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne, qui seront auditionnés demain après-midi par la Commission développement durable de l’Assemblée sur le soutien de l’État aux entreprises stratégiques et leurs engagements écologiques, n’ont pour l’heure posé la moindre condition environnementale à l’octroi de ce prêt, alors que la transition du secteur automobile devrait être au cœur de la relance.

Pour rappel, le gouvernement et sa majorité parlementaire se sont refusés à inscrire dans la loi le fait de conditionner l’aide financière, en cas de recapitalisation d’entreprises polluantes, à un changement en profondeur de leur modèle économique.

Pour sauver le climat, moins de voitures

« La sortie de crise ne doit pas passer par la relance du secteur à l’identique, avec l’incitation à produire et acheter toujours plus de voitures individuelles et toujours plus de SUV, déclare Sarah Fayolle, chargée de campagne Transports chez Greenpeace France. Le gouvernement a l’occasion de faire enfin preuve d’ambition sur les questions de mobilité, de remettre à plat notre façon de nous déplacer et de sortir du tout-voiture. On sait à quel point cet enjeu est vital pour lutter contre les changements climatiques, mais aussi contre la pollution de l’air qui rend les populations plus vulnérables face aux épidémies, comme le Covid19 ».

Pour Greenpeace France, tout argent public injecté dans le système de transports doit donc à la fois être conditionné à des contraintes de transitions fortes pour les entreprises aidées, comme Renault, et surtout permettre de développer un système plus écologique fondé sur le ferroviaire, les transports publics et le vélo.

Aides pour Renault : organiser la fin des véhicules diesel/essence et mettre un coup d’arrêt aux SUV

Les cinq milliards d’euros de prêts garantis par l’Etat doivent donc, pour Renault, s’accompagner de l’obligation, inscrite dans la loi, d’avoir un plan contraignant de transformation compatible avec les objectifs fixés par l’Accord de Paris. Ce plan doit notamment intégrer :

– Une transformation du modèle économique de l’entreprise, dans un contexte où l’enjeu ne doit plus être de produire toujours plus de voitures, électriques ou pas, mais bien au contraire de réduire le nombre de véhicules en circulation au profit des mobilités partagées et d’autres modes de déplacement que la voiture.

– Une feuille de route pour mettre fin à la production et à la vente des véhicules fonctionnant avec du diesel ou de l’essence au plus tard à l’horizon 2030. Cette échéance doit en effet être avancée par rapport à la date de 2040 fixée dans la LOM (loi mobilités) pour avoir une chance de respecter l’objectif climat 1,5°C.

– Un coup d’arrêt à la logique actuelle de croissance du segment SUV et la priorisation de modèles de voiture plus légers, petits et sobres.

« Conditionner les aides au secteur automobile est évidemment indispensable, mais l’Etat a également une énorme responsabilité pour nous sortir de la dépendance aux véhicules polluants, continue Sarah Fayolle. Il lui faut par exemple investir massivement dans le ferroviaire, les transports publics et les mobilités douces ; inscrire dans la loi la fin des véhicules diesel et essence bien avant 2040 ; ou encore mettre fin aux projets routiers et autoroutiers qui seront générateurs de trafic supplémentaire, d’augmentation des émissions et de la pollution ».

Montants colossaux contre tout petits engagements pour Air France

Le précédent d’Air France n’a rien d’encourageant. La semaine dernière, la compagnie aérienne s’est vu octroyer un soutien de sept milliards d’euros sans aucune contrepartie environnementale contraignante. Les engagements volontaires mis sur la table à ce stade par l’entreprise et le gouvernement restent flous, peu ambitieux, voire carrément problématiques, comme la fausse solution des agrocarburants. Pour Greenpeace France, il est impensable que le gouvernement s’en satisfasse.