Riz doré : promesses non tenues
Connu sous le nom de « riz doré », cet OGM est pourtant loin d’être une idée brillante. Après 20 ans de recherche, il n’a apporté aucune solution et n’est toujours pas disponible à la vente. De l’aveu même de son concepteur, l’Institut international de recherche sur le riz (IRRI), il n’existe aucune preuve que le riz doré soit une solution à la carence en vitamine A (CVA), l’une des principales sources de malnutrition à travers le monde.
Certains scientifiques nous ont accusés jeudi dernier dans la presse de paralyser le développement du riz doré. Nous ne pouvons que nous en remettre aux faits : le riz doré n’existe pas. C’est une impasse, une expérimentation coûteuse et ratée. En revanche, des millions d’agriculteurs aux Philippines et de par le monde ont besoin d’un soutien approprié. Ce n’est pas seulement notre point de vue, c’est aussi celui de scientifiques spécialistes de la question dont les travaux ont été publiés dans plusieurs revues scientifiques.
Polémique à un moment opportun pour le lobby pro-OGM
Le cas du riz doré ne refait pas surface par hasard. En effet, dans l’État du Vermont, aux États-Unis, l’étiquetage des OGM devrait devenir obligatoire le 1er juillet 2016. Ce serait une grande première et un grand revers pour l’industrie des OGM. Cependant, le Sénat a proposé l’adoption d’une loi fédérale qui primerait sur la loi de l’État et donnerait bien plus d’amplitude aux industriels quant à l’étiquetage de leurs produits.
Autre hasard du calendrier : cette offensive précède des échéances dans les semaines et mois à venir sur la question des « nouveaux OGM », en Europe notamment.
Le riz doré, cheval de Troie des OGM
Le riz doré est un cheval de Troie du lobby pro-OGM qui espère, grâce à celui-ci, ouvrir la voie vers une autorisation globale des plantes génétiquement modifiées. L’argument de lutte contre la faim n’est qu’un argument marketing pour tenter de faire accepter les OGM.
Le développement, l’utilisation et l’efficacité de technologies telles que l’ingénierie génétique, ne devraient pas être évalués d’un point de vue unique – c’est-à-dire, dans le cas présent, le point de vue technocrate de scientifiques occidentaux. En 2008, l’Évaluation internationale des connaissances, des sciences et des technologies agricoles pour le développement (IAASTD), issue de la collaboration de 400 experts agricoles, a évalué la question de l’ingénierie génétique selon une approche multidisciplinaire. D’après cette évaluation, il est clair que les OGM ne sont pas la solution aux problèmes urgents de résilience climatique, d’impact écologique et d’insécurité alimentaire. Au contraire, ils sont sources de problèmes supplémentaires : utilisation de pesticides, domination du marché par quelques multinationales et incertitudes fondamentales quant à notre capacité à nourrir la planète si le paradigme de l’agriculture haute-technologie persiste.
Greenpeace a publié aussi depuis des années des dizaines de rapports scientifiques qui montrent que les OGM n’ont rien tenu des grandes promesses d’augmentation de rendements agricoles, et donc finalement n’ont en rien contribué à la baisse de l’insécurité alimentaire ou de la malnutrition dans le monde. Ils n’ont tout simplement pas été conçus pour ça.
La seule solution : l’agriculture durable
Pour Greenpeace, l’agriculture n’est pas qu’une activité technologique ou de production complètement désolidarisé de la biodiversité et de l’environnement. Nous soutenons un modèle d’agriculture sain, débarrassés des intrants issus de l’agrochimie ou des biotechnologies, plus harmonieux avec la nature, qui fonctionne avec elle et pas contre elle, qui rompt avec la tendance aux monocultures sur des étendues toujours plus vastes et qui s’adapte aux particularités de chaque population.
Plutôt que de soutenir des expérimentations coûteuses comme le riz « doré », qui n’a produit aucun résultat en 20 ans, les scientifiques du monde entier devraient se concentrer sur le développement de la résilience climatique du système agricole mondial. La réponse à la malnutrition se trouve dans un régime varié, dans un accès équitable à l’alimentation et dans un modèle agricole écologique résilient aux changements climatiques.
Des techniques modernes de sélection végétale, sans modifications génétiques, existent et font partie de la solution. La sélection assistée par marqueurs, par exemple, permet d’identifier les cultures aux caractéristiques avantageuses telles qu’une teneur plus élevée en vitamines et minéraux, une résilience aux changements climatiques ou encore une résistance à certaines maladies. Là où il est mis en œuvre, ce modèle, aux coûts économiques et environnementaux réduits, s’avère bien plus efficace pour répondre à la crise agricole et alimentaire que l’ingénierie génétique ne l’a été jusqu’alors.
Aux Philippines, pays où siège l’IRRI, en l’absence de solution promise par les défenseurs de l’ingénierie génétique, les agriculteurs travaillent chaque jour à la production d’une nourriture saine qui nourrira les familles philippines et leur permettra de résister aux impacts des changements climatiques. Dans ce pays, les périodes de sécheresse et les typhons n’attendent pas, et les agriculteurs philippins ne peuvent pas attendre la panacée. Il existe déjà des alternatives sûres et efficaces pour les aider à nourrir leurs communautés.
Greenpeace soutient et continuera de soutenir la démarche de ces agriculteurs qui « mettent la main à la terre ».